La Martinique en transition : bonne ou mauvaise nouvelle ?

Martinique en transition Europe Odisea Actus

Lors du dernier concours des Trophées des Initiatives FSE, la Martinique s’est fait remarquée grâce à l’Association Solidarité Lamentinoise, porteuse du chantier d’insertion en faveur des détenus sur la période 2014-2020. Aujourd’hui, une nouvelle période s’ouvre avec la programmation 2021-2027, et la Martinique opère également un changement de taille…

Martinique, région en transition… C’est non seulement un constat mais désormais aussi un statut.

Pour la période 2021-2027, la Martinique change de statut et dévient une région européenne « en transition ».. En quoi ce changement de qualificatif est révélateur de l’efficacité des politiques régionales menées par l’Union européenne et quelles sont les conséquences sur les dispositifs de financements européens en Martinique… et le portefeuille des porteurs de projets ?

Politique régionale de l’UE : réduire les disparités entre les régions

Afin de promouvoir un développement harmonieux sur l’ensemble de son territoire, l’Union européenne renforce sa cohésion économique, sociale et territoriale. Elle vise, en particulier, à réduire l’écart entre les niveaux de développement des diverses régions qui la composent.

L’Union européenne se compose de 242 régions – pas forcément sur le même modèle que les régions françaises puisque c’est la nomenclature « NUTS2 » de la Commission européenne qui délimite ces régions (NUTS2 étant la base régionale sur laquelle se repose l’UE pour définir sa politique régionale).

Au-delà de cette nomenclature, toutes ces régions sont catégorisées par l’Union européenne pour déterminer le niveau de cohésion à travers l’Europe.

Des catégories déterminées en fonction de critères économiques et sociaux.

Les catégories de région sont déterminées au niveau européen sur la base du rapport entre le PIB par habitant et le PIB moyen de l’Union européenne à 27. Trois catégories principales sont déterminées dans ce cadre :

  • les régions les moins développées
  • les régions en transition
  • les régions les plus développées

Les régions les moins développées ont un PIB par habitant inférieur à 75 % de la moyenne de l’UE ; les régions en transition ont un PIB par habitant compris entre 75 % et 90 % de la moyenne de l’UE ; et les régions les plus développées ont un PIB supérieur à 90%.

Une quatrième catégorie est maintenue sur 2021-2027 et concerne toutes nos régions françaises d’Outre-Mer (Martinique y compris) : les régions ultrapériphériques.

Toutes nos régions d’Outre-Mer étaient classées en régions les moins développées sur 2014-2020.

Pour 2021-2027, et pour la première fois, la Martinique quitte ce statut et devient une région en transition.

EuroGeographics Association
Des catégories qui conditionnent le niveau de soutien apporté par l’Union européenne.

Chaque qualification entraîne un soutien plus ou moins important sur les dispositifs des fonds européens structurels et d’investissement (FESI) : l’enveloppe allouée à la région et le taux de cofinancement européen varient selon les catégories de régions.

Pour les régions les moins développées – telles que la Guadeloupe, la Guyane, Mayotte, La Réunion, cela signifie un taux d’intervention maximal à 85% (cofinancement européen). A l’autre bout des niveaux, les projets des régions les plus développées comme l’Île-de-France ne peuvent bénéficier de plus de 50% de cofinancement européen au titre du FEDER ou FSE+.

Quant au montant de l’enveloppe allouée, les dotations aux régions se basent aussi sur la taille de la population et le niveau de richesses des régions.

Régions en transition : la Martinique au même rang que l'Hexagone

La Martinique auparavant classée dans la catégorie « régions les moins développées » possède désormais le statut de région en transition. Elle rejoint ainsi la plupart des régions de France hexagonale, puisque seules deux de ces régions sont « plus développées« , les autres étant toutes en transition.

Ce changement de statut pour la Martinique souligne l’efficacité, entre autres, de la politique régionale de l’UE. La Martinique a vu son PIB augmenté de 7 626 millions d’€ en 2007 à 9 082 millions d’€ en 2021 (INSEE).

Conséquences pour la Martinique : plus de solidarité, moins d’aides ?

Si ce nouveau statut est révélateur d’un meilleur indicateur socio-économique pour la Martinique, les porteurs de projets martiniquais pourraient en subir une conséquence de taille. Alors que les régions les moins développées sont soumises à un cofinancement maximal de l’UE de 85% (et la Martinique bénéficiait de ce taux sur 2014-2020), la région désormais en transition est normalement soumise à un taux maximal de cofinancement européen de 70 %.

Ce nouveau taux est quand même une exception : seules les régions qui ont récemment changé de statut peuvent prétendre à une intensité d’aide supérieure aux autres régions en transition, dont le cofinancement européen ne peut dépasser 60%.

Ces chiffres sont à nuancer… et la bonne nouvelle est double : sur le FSE+ national, les taux d’intervention sont plus ou moins élevés selon les priorités stratégiques. Ainsi, l’aide alimentaire et l’innovation sociale peuvent permettre d’atteindre un cofinancement européen de 90% et 95% respectivement pour les régions en transition.

D’autre part, la Martinique est dans la catégorie très particulière des régions ultrapériphériques (RUP). Or, les actions réalisées au titre des crédits RUP peuvent dans tous les cas bénéficier jusqu’à 85% de cofinancement européen !

Une enveloppe moins importante que sur le dernier programme

En ce qui concerne l’enveloppe allouée, la Martinique en tant que région en transition bénéficie au total de 600,5 millions d’euros pour 2021-2027, au lieu de 783,1 millions d’euros en 2014-2020. Au sein de cette nouvelle enveloppe globale, les crédits FEDER-FSE+ qui ne concernent que son statut « en transition »  (donc hors crédits RUP supplémentaires accordés aux régions d’Outre-Mer), s’élève à 492,7 millions d’€.

Ce montant aligne la Martinique avec d’autres régions en transition : par exemple, la Bretagne a obtenu 392,8 millions d’€ et le Centre-Val de Loire a obtenu 412,4  millions d’€.

Une évaluation plus pointue pour une solidarité plus juste…

En réalité, les dotations allouées se basant sur une multitude de données croisées telles que le PIB des régions, le PIB de l’UE, le niveau de chômage dans les territoires, la taille de la population des régions, la contribution aux objectifs environnementaux, les priorités de l’UE, de la France et de chaque région …, l’analyse comparative se doit être plus complexe.

Cependant, on peut retenir que la Martinique, aujourd’hui région en transition, participe désormais à l’effort de solidarité européenne puisque les fonds non alloués aux régions européennes « en transition » et « les plus développées », sont transférés aux régions les moins développées de l’Union européenne.

– Rédac : Ludovic B. & EJ / Rédac-chef : EJ

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